Source : http://www.sacem.fr

 

"C'est une étrange entreprise, disait Molière, que celle de faire rire les honnêtes gens". Et il faut, pour y parvenir, de non moins étranges larrons, tour à tour caméléons, Sganarelle, Auguste et Matamore, jongleurs de mots et funambules du gag, croqueurs de portraits et mélangeurs de genre, et pour tout dire hommes-orchestres passés maîtres dans l'art d'épingler les travers de leur époque aux revers de leurs concitoyens. Quoi de plus normal que cette école ait aussi fourni les meilleurs tragédiens, de Molière à Chaplin, de Bourvil à Woody Allen, de Coluche à... Patrick Timsit, dont le registre cinématographique, d'"Un indien dans la ville" à "Marquise", de "La crise" à "Pédale douce", du "Cousin" au prochain "Quasimodo" coécrit, réalisé et interprété par lui, confirme toutes les promesses révélées naguère au café-théâtre, sur le plan du jeu comme de l'écriture.

Si chaque comédien a en effet, par définition, plusieurs vies, Patrick Timsit, lui, en a au moins trois: une vie de cinéma (aujourd'hui prépondérante), une vie de café-théâtre et une ex-vie de télévision, sans parler de sa vie antérieure de... vendeur dans l'immobilier: "Moi, je suis né à 22 ans", confessait-il naguère à "Fréquenstar", à propos de son soudain virage de carrière. Pour l'état civil, c'est néanmoins le 15 juillet 1959 que naît à Alger, au 6, rue Monge, Patrick Simon Timsit, de parents maroquiniers. A deux ans et demi, comme beaucoup de rapatriés, il rejoint avec sa famille la France, où il... changera six fois de lycée entre la sixième et la terminale. Après un bac D, il quitte les études pour l'immobilier où travaille désormais son père, et y exerce à son tour pendant 4 ans, ouvrant même deux ans après sa propre agence, rue Lamarck à Paris. Ce qui lui inspira d'ailleurs plus tard un de ses meilleurs sketches, "Les petites annonces".

  Il aurait pu prospérer ad lib dans cette carrière florissante (jusqu'à la crise), s'il n'avait croisé un jour au Bois de Boulogne un autre destin qui le mena, lui, à une autre Crise, cinématographique celle-là. Ce jour-là, il rencontre "une copine qui lui présente un copain, Jean Michel Noiret, qui s'occupait d'un atelier de théâtre au Ranelagh". Patrick alla y voir, en 1983, et... n'en revint pas ! Là, il vivra ses premières expériences théâtrales avec une quinzaine de comédiens, comme d'autres furent les enfants du Café de la Gare ou du Splendid (où il se produisit d'ailleurs plus tard). Dés lors, fini la BMW, les beaux appartements, il entame à 24 ans sa bohème, sa vie d'artiste, connaissant son "premier bide" avec son premier spectacle, plutôt d'avant-garde. Deux ans après, voilà nos vedettes en herbe à la rue et Patrick au pays des vaches maigres, en l'occurrence l'Eden Théâtre (Xxème arrdt) où ils continuent leurs expériences scéniques.

Mais le destin veille au grain, et c'est alors que se produit le second hasard, si tant est que cela existe. Celui-là s'appellera... SACEM, à l'occasion d'un stage de formation d'humoristes organisé par cette société avec le concours de nombreux professionnels du rire, et clos par un spectacle devant tout le métier. Pour s'inscrire, Patrick écrit son premier sketch, une "histoire très hard" dans l'esprit de ses maîtres Reiser, Desproges, Hara-Kiri (et au cinéma les Monthy Python), et est sélectionné parmi quelque 400 candidats. Tout Timsit est déjà là, dans cet humour corrosif, dévastateur, mâtiné de tendresse comme la plage sous les pavés. Suivront 7 ans de Festival Off à Avignon, à commencer par, en 1987, un premier spectacle acidulé, pour ne pas dire féroce, qu'il donnera ensuite au "Café de la Gare" (on y revient toujours) sous le titre de "Timsit lâche le morceau". Entre-temps, il sévit aussi dans la publicité où il fait un sketch mémorable pour IKEA, réalisé par l'ami Gérard Jugnot, et fait ses premiers pas au cinéma ("Paulette" de Claude Confortès en 1985, "Le crime d'Antoine" en 1987). La même année, il fait sa première mise en scène avec "Embrasse moi idiot" des Bill Baxter, qu'il dirigera aussi plus tard dans "El Segundo", tout comme il mettra par la suite en scène "Les Filles" (Mimie Mathy, Michèle Bernier et Isabelle de Botton).

Il enchaîne avec... "Déboule et débite" au Splendid, spectacle acide, violent, où il chante également, et fait alors, avec son camarade Nicolas Errera, la connaissance du célèbre producteur Pierre Bromberger. Il en résultera un court-métrage très original, "Aller à Dieppe sans voir la mer" (1989), et un nouveau déclic dans la carrière de Patrick: sa rencontre avec son futur coauteur, le sémillant Bruno Gaccio, et son nouveau producteur, Denys Limon, associé de Claude Fléouter, qui lui proposent tout de suite de collaborer à l'élaboration d'un "Show André Lamy" pour Antenne 2, avec Ticky Holgado, Jean-François Halin et Alexandre Pesle. Pendant un mois et demi, il vont écrire à cinq un show tellement explosif, un peu comme Jean Yanne et Jacques Martin à leurs débuts, que la télé... refusera de diffuser l'émission, intitulée "Au secours les carottes font rire" (1989), et animée par Gérard Jugnot, Gérard Darmon, Martin Lamotte, Charlotte de Turkheim...

Dépités, nos héros décident alors d'écrire un one-man-show, tout simplement intitulé "Timsit": "J'essaie d'avoir toujours un fond sous la légèreté, un propos, je pars d'un vrai problème, de quelque chose que j'ai vraiment envie de dire, par exemple sur la différence...". Une ligne d'écriture qu'on retrouve dans nombre de ses sketches, depuis "Les vieux" à "Ils sont partout", des " Timides" à "J'attends un bébé", toujours écrits avec l'équipe Gaccio/Halin/Pesle qui triomphera par la suite dans les "Guignols de l'Info", Pesle ayant rejoint "Les Nuls". En 1991, après une autre incursion télévisée dans "Avant que le ciel nous tombe sur la tête", où il monte des "caméras cachées" pas piquées des hannetons (un autre sketch, "Vedette de télé", alias "François Ledu", naîtra d'ailleurs de ces pérégrinations cathodiques), il donne enfin "Vite", son premier spectacle (très ravageur) dans la petite salle du Palais des Glaces. Puis c'est "Venez nombreuses" (!) au Théâtre Tristan Bernard, et "Millésime 94" au Palais des Glaces, qui lui vaudra d'ailleurs la "Victoire de la Musique de l'Humoriste de l'Année".

Mais, à côté de la scène et du petit écran, il n'a pas cessé de tourner des films, de "Sans peur et sans reproche", de Gérard Jugnot (1988) et "La vitesse d'un cheval au galop" (1990) au "Bal des Casse-pieds" (Yves Robert) et à "Mayrig" (Verneuil-1991). Et ce qui devait arriver arriva: en 1991, parallèlement à son spectacle au Tristan Bernard, c'est "la rencontre avec un auteur, un metteur en scène et une femme d'exception", Coline Serreau, qui, sans l'avoir vu en scène, va imaginer pour lui le personnage de Michou, dans son film "La crise", aux côtés de Vincent Lindon. Immédiatement, c'est le succès, confirmé deux ans après (1994) par "Un indien dans la ville" d'Hervé Palud avec Thierry Lhermitte, puis l'année suivante dans "Pédale douce" de Gabriel Aghion, dont il sera d'ailleurs l'adaptateur sur un scénario de Pierre Palmade. Enfin en 1996 /1997, il va compléter sa palette d'acteur en interprétant coup sur coup trois rôles plus "dramatiques", dans "Passage à l'acte" de Francis Girod, "Marquise" de Véra Belmont (avec Sophie Marceau) et "Le cousin", d'Alain Corneau avec Alain Chabat, revenant ensuite à la comédie décapante avec "Paparazzi" d'Alain Berbérian avec Vincent Lindon.

C'est alors qu'il décide de passer à la mise en scène cinématographique et se dirige dans son premier long métrage, "Quasimodo", à sortir en avril prochain, avec entre autres à ses côtés Richard Berry (Frollo), Vincent Elbaz (Phébus) et Mélanie Thierry (Esmeralda). Ce qui n'empêche pas ce touche-à-tout de talent de préparer d'ores et déjà de nouveaux sketches avec sa fine équipe (Bruno et Jean François, également co-scénaristes du film avec Raffy Schart) pour une éventuelle rentrée sur les planches en 1999.

Un artiste complet, inclassable et prometteur, qui s'inscrit déjà dans la tradition des grands comédiens d'avant-guerre par sa verve et sa fougue ("J'aime l'ambiguité", avoue-t-il ) et rejoindra bientôt celle des grands auteurs de comédie contemporains (Dino Risi etc) par son sens de l'observation, de la formule et de la dérision.

 

Portrait chinois    (Source : http://www.ladepeche.fr)

Patrick Timsit, si vous étiez un arbre?
Alors là, j'ai toujours ramé dans ce genre de questionnaire!... Je serai un olivier! Parce que c'est très beau et qu'on a décidé avec des copains de faire de l'huile d'olive.

Un animal?
Oh la la!... Je ne me pose jamais de questions auxquelles je ne peux pas répondre. Et là, c'est impossible pour moi. Il y en a qui vous diraient «un morpion pour être sur le pubis»!? (Rires) D'autres, «une girafe pour voir de plus haut»... Là, je suis vraiment gêné!

Un pays?
Heu... Alors franchement, je ne vois vraiment pas!

Une couleur?

Je serai orange. La chaleur, l'ambre mêlé d'ocre.

Une femme?

Ah! Heu... C'est pour repérer les serial killers ou quoi!!!?... C'est fou, je ne peux pas!... Je n'arrive pas à m'imaginer en femme! Ou alors ça serait trop sérieux... Simone Veil!

Un livre?

«Le livre de ma mère» d'Albert Cohen.

Une star?

Mike Jagger!

Une chanson?

Bella Ciao.

Une matière?

Souple. Tout ce qui plie...

Un film?

La Grande illusion.

Une ville?

Si je dis pas Toulouse (rires), je serais fou!... (Rires) Oui, alors je serais fou!

Une émission de télé?

Alors là!... C'est un peu comme le pays, je vais sécher!

Vous n'êtes pas télé?

Ah si! A mort! Il faut voir ce qui se passe à la télé! Pour pouvoir regarder et zapper! Et puis il y a une place formidable pour les documentaires, pour les informations. Alors on zappe. A grande vitesse et ça me suffit.

Une voiture?

Le confort, l'espace avec quand même une petite touche de design. C'est bien aussi de vivre avec son époque.

Un chiffre?

Le 22! (Rires) Parce que je trouverais tellement ridicule d'être le 23! (Rires). Je vivrais tellement mal!... Epouvantable!

Un plat cuisiné?

Le couscous de ma mère.

Un monument?

Un monument aux vivants!

POUR ECRIRE A PATRICK TIMSIT

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